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BUFFET DE LA GARE



Mémoire d'établissements Horeca



09/06/2021

Le buffet de la Gare

L’histoire du buffet de la gare révèle un défi majeur de l’urbanisme du quartier
de la gare. Plusieurs formules étaient expérimentées au fil des années. Leur
succès temporaire met à l’épreuve toute réflexion tant sur l’aménagement de la
gare que de son parvis. L’environnement concurrentiel était élevé avec une
concentration de plusieurs hôtels-restaurants / brasseries situés à proximité.
La réorganisation de la place de la Gare, suite à l’arrivée du tram, permettra
de repenser le fonctionnement social de cet espace, de rechercher une solution
pour mieux l’intégrer comme lieu urbain « organique », et en vue de lui assurer
une vocation dépassant bien celle d’un lieu de canalisation des flux des
voyageurs. Actuellement, le bâtiment de la gare occupe une position de solitaire
sur son parvis servant à l’embarquement et au débarquement des voyageurs. Il ne
se prête guère à un lieu de séjour.

Du temps de la forteresse

Les plans présentés en juin 1858 pour la construction d’une gare en bois, à
Luxembourg, réservaient l’aile gauche de l’immeuble à un buffet pour accueillir
et restaurer les voyageurs de train. Le rayon militaire de l’ancienne forteresse
n’autorisait point la construction de bâtiments en pierre, mais uniquement en
colombage et en bois. Quoique le buffet de la gare existait bien, la publicité
du « Chalet de Dallé », situé en face affirmait, qu’en 1864 il assurait la
fonction de « buffet de la gare » et de petite échoppe pour les voyageurs en
départ ou justement arrivés. Ceux-ci s’y procuraient des bonbons pectoraux
rafraîchissants. La clientèle des voyageurs était bien internationale comme
l’illustrait, en 1871, le recrutement d’un garçon de salle bilingue,
français-allemand. Xavier Vanière exploitait le buffet de la gare à une époque
d’importants changements. En 1867, Luxembourg devint une ville ouverte. Entre
1875 et 1904, le tramway, les chemins de fer à voie étroite en direction de
Remich et Echternach, la ligne vers Pétange rejoignaient les lignes existantes
et assuraient à l’espace le caractère de « gare centrale ».  En 1890 la gare fut
agrandie d’une tour avec guichet et de deux ailes, comprenant entre autres un
restaurant. Nicolas Wagner-Lentz reprit l’entreprise en 1899. Les plans de
construction d’une nouvelle gare, dressés en 1903, prévoyaient deux restaurants,
l’un pour les voyageurs de première et de deuxième classe, l’autre était intégré
à une salle d’attente pour les voyageurs de troisième classe.

Un attrait nouveau pour la capitale

En 1910, Nicolas Wagner inaugurait avec fierté le « buffet de la gare » aménagé
dans la nouvelle gare entièrement construite en pierre. Les plans avaient été
dessinés par Alexander Rüdell, d’après le modèle de la gare qu’il avait conçue
pour Stralsund ainsi que de la gare de Wiesbaden. Le journal « L’Indépendance
luxembourgeoise » appréciait la terrasse qui fut « d’un effet très heureux »,
mais aussi la salle à manger au bout de la galerie. « Dès à présent, on peut
prédire que le buffet de la gare de Luxembourg opérera une grande attraction sur
les habitants de l’agglomération et donnera à la ville un cachet qui précisément
qui manquait de ce côté-là ». Le restaurant pouvait servir jusqu’à 120 couverts.
Nicolas Wagner-Lentz s’assurait l’intérêt de la clientèle en l’invitant toujours
à la dégustation de nouveaux produits, tel que des cubes dissolubles de
bouillon, qu’ils pouvaient s’acheter pour leur propre cuisine. La clientèle fut
typique de celle des gares internationales avec ses couches sociales changeant
au rythme des heures et des jours, ses rixes, ses affaires de moeurs. Suite au
décès de M Wagner en 1922, le buffet fut mis en adjudication publique et reprit
par Victor Schammel-Steinborn, restaurateur et ancien gérant du buffet de la
gare de Pétange. En 1931, ce restaurateur francophile soutenait pas un don,
l’érection d’un monument en honneur de l’homme politique français et Prix Nobel
de la Paix (1926), Aristide Briand. Pour attirer toujours l’intérêt de la
clientèle, il organisait pendant l’Entre-deux-guerres des courses aux plateaux
pour garçons de salle. En 1947, Schammel recommandait son établissement
pour « Restaurant connu, très renommé », sa Cave « des meilleurs crûs » et les
Apéritifs de la  marque « D’Union ».

« Péckvillchen, « De neie Buffet », „Sandwicherie“

A partir de 1964 l’établissement allait être géré par  G. Pirrotte, qui avait
fait ses classes à l'Ecole Hôtelière de Lausanne. D’importantes transformations
de l’espace du buffet de la gare, venaient de subdiviser l’ancien buffet sur
deux niveaux. Dès les années 1960, le « buffet » devint progressivement le
rendez-vous incontournable pour des assemblées générales d’associations
culturelles, syndicales, de conférences de presse, de conférences publiques,
voire même de soirées électorales. Le restaurant accueillait également des fêtes
de familles, dont les déjeuners à l’occasion de la première communion, sont
restés dans la mémoire des aînés.

En 1969,  à côté de sa brasserie au rez-de-chaussée, au premier étage, un
 restaurant de luxe,  le „Relais Gastronomique" allait voir le jour.  « Cadre
choisi, service stylé, bonne cuisine, un peu trop copieuse peut être. Les gros
mangeurs y trouveront leur compte, les raffinés moins » notait à l’époque
l’hebdomadaire le « d’Letzeburger Land ». En 1971, G. Pirotte inaugurait son
restaurant  „Peckvillchen". Procédant d'une authentique inspiration patriotique
le nouvel établissement ajoutait une dimension originale à la restauration de la
capitale. Le restaurateur n'avait d'ailleurs pas manqué de s'entourer de
conseillers folkloriques, gastronomiques et artistiques, ce qui l'avait amené à
offrir, dans un cadre reflétant cette inspiration, plus d’une vingtaine de
spécialités luxembourgeoises. Ce qu'il y avait de plus original ce fut sans
doute sa formule du self-service.

Après un nouvel réaménagement du bâtiment des voyageurs et la création d’une
galerie marchande couverte dans l’aile renfermant le buffet, une nouvelle
formule d’exploitation, « Den neie Buffet » allait s’offrir aux consommateurs en
1991. L’établissement proposait une caféteria offrant un plat du jour, un buffet
chaud et froid. L’espace « véranda » vantait « son excellente cuisine du
marché », et le bar « Rotonde » servait des plats « toute la journée ».
L’établissement accueillit les premiers clients dès à 4.30 heures et les servait
jusqu’à 24 heures. Le brunch dénommé « Sonndeskascht » visait à rattraper, le
dimanche, le fléchissement, des clients navetteurs de la semaine.

Entre 1998 et 2001, Léa Linster, lauréate du Bocuse d’Or 1989, exploitait, au
premier étage, une brasserie haut de gamme, le « Buffet de la Gare ».

Avec l’arrivée du TGV à Luxembourg en 2007, toute l’infrastructure de la gare
fut à nouveau réaménagée. L’espace restaurant au premier étage fut récupéré par
des services propres aux CFL. Olivier Pirotte ouvrait une sandwicherie, donnant
sur le hall des voyageurs et proposait un espace lounge avec un service à table
et en été sur la terrasse. L’établissement accueillit voyageurs et résidents de
06.00 heures à 22.00 heures. Fermé pour cessation de bail, le 31 décembre 2017,
il est prévu d’ouvrir, fin 2018, un nouvel établissement, sous une nouvelle
forme. Robert L. Philippart



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